jeudi 20 septembre 2012

Grandeur et misères

Un message alors que je n'ai pas fini la lecture du Gang de la clef à molettes (préfacée par Robert Redford)... Finalement, je suis contente d'avoir découvert Edward Abbey après mon voyage, et pas avant. Car ainsi je peux vérifier que je ne suis pas la seule à avoir éprouvé un malaise à Page, alors que l'ensemble des publications touristiques et des visiteurs est enthousiaste à l'excès. Pour Abbey, ce malaise est une révolte.
Page est une ville triste, sans âme et sans passé, construite dans les années soixante pour abriter les ouvriers du barrage du Lac Powell et ensuite les touristes du monde entier - je dirai majoritairement français (allez savoir pourquoi), et surtout américains. Une succession de motels, de magasins, de restaurants, d'agences navajos pour visiter les slot canyons (car on est en territoire navajo, ou juste à côté, allez savoir où se trouve la ligne de démarcation). Une rue où se succèdent côte à côte 12 ou 13 églises chrétiennes différentes (le chiffre diffère selon les sources), le commerce de la prière de la rue Jésus, comme l'appelle Abbey. Et en périphérie, les habitations-taudis des Navajos.
Le barrage - une fierté technique - a inondé un des plus beaux canyons de la région, le Glen Canyon - et le lac de retenue porte le nom de Powell, qui fut le premier à l'explorer en descendant le Colorado et ses rapides - une insulte à son nom. J'ai participé à une excursion en bateau sur le lac, avec exploration d'un canyon secondaire, et éprouvé une profonde nostalgie en imaginant tout ce qui est perdu au fond de l'eau. Et remplacé par des loisirs de luxe. Le Colorado qui coule sous le nouveau pont près du barrage est désormais canalisé... A quoi sert ce barrage ? A apporter l'électricité dans les villes champignons lointaines - et il n'est pas le seul, je pourrais aussi évoquer celui qui a été construit pour alimenter Las Vegas et se révèle insuffisant.
Mais l'ire d'Abbey se manifeste surtout à l'encontre du barrage du Lac Powell, que l'équipe de son livre veut saboter.
Dans le même ordre d'idées, je dois faire une rectification. Dans le magnifique paysage du Glen Canyon inondé, à quelques mètres de l'entrée des deux Antelope Canyon, en territoire navajo, surgit cette improbable centrale thermique au charbon, à ciel ouvert; dans mon blog, je l'ai qualifiée d'usine de cuivre, trompée que j'étais par le nom de la rue qui y mène: Copper Road. Depuis, je me suis documentée. Cette usine est une des 12 usines les plus polluantes des USA !!!!!! Elle n'appartient même pas aux Navajos, mais ils ont signé un contrat de longue durée, sans mesurer à l'époque les dangers futurs.  Quel paradoxe, dans ce lieu magnifique, ce paradis, gagné par une pollution extrême et irréversible.



Photos: vous me pardonnerez le mauvais cadrage...

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